Taste Camp 2013 – À la rencontre des artisans du vin québécois

À chaque année, lorsque le mois de mai arrive, je trépigne d’impatience: Tastecam arrive! Cette rencontre annuelle de blogueurs vin (et bouffe) de l’est de l’Amérique du Nord dans une région viticole méconnue fait maintenant partie du calendrier annuel.

Long Island (où je n’y étais pas) puis les Finger Lakes, Niagara et la Virginie ont tour à tour accueilli les campeurs. Cette année, j’étais sur le comité organisateur pour amener tout ce beau monde au Québec!

Pendant une longue fin de semaine, on goûte beaucoup de vin. Du très bon et du moins bon mais un aspect est constant à chaque année: on part à la rencontre de passionnés qui mettent tout leur coeur dans leurs produits. Coup d’oeil sur quelques rencontres marquantes de ce cinquième Tastecamp.

pervenches

Un des moments que je préfère à Tastecamp est le samedi matin, oú un producteur nous amène marcher dans le vignoble et nous explique ses techniques de travail et sa philosophie. Cette année, nous avons eu la chance de suivre Michael Marler du domaine des Pervenches.

Ses vins, principalement disponibles au domaine, représentent selon moi ce qui se fait de mieux au Québec. Avec sa conjointe Véronique, ils ont fait l’acquisition de ce bout de terre à Farnham (entre autres) à cause des vignes de chardonnay plantées par l’ancien propriétaire. Aujourd’hui agées d’une vingtaine d’années, elles produisent aujourd’hui une cuvée qui se disparaît rapidement à chaque année. L’année prochaine, la production de ces vieilles vignes devrait être embouteillée séparément en une cuvée particulière afin de montrer ce que cette parcelle a dans le corps.

Vous pouvez acheter tout ce qui provie t de ce domaine les yeux fermés et vous ne serez pas déçus. Le Seyval-Chardonnay est craquant et vif, le Solinou est un rouge de soif au fruité frais et brillant et la version 2012 du Chardonnay, que nous avons goûté directement des barriques est très prometteuse. On note que puisque 2012 a été une année exceptionnelle et que Michael n’a pu mettre la main sur une barrique usagée pour contenir le surplus de production, environ 10% de la cuvée 2012 aura vu du bois neuf, mais le vin devrait avoir assez de corps pour le soutenir… À suivre!

orpailleur

Rencontrer Charles-Henri de Coussergues, c’est discuter avec un pionnier de la viticulture au Québec. Depuis près de 30 ans, le vignoble de l’Orpailleur tente d’extraire le plus de qualité possible de leur terroir de Dunham. Le métier de vigneron au Québec a essentiellement été défini par le travail acharné de M. de Coussergues et on se doit tous de lui lever notre chapeau!

Le plus ancien vignoble au Québec produit surtout du vin tiré de vignes hybrides, plus résistantes aux froids québécois, mais un mouvement vers les variétés Vitis Vinifera comme le chardonnay et le rissling est en marche depuis quelques années.

Le domaine est surtout reconnu pour son vin de glace à base de vidal, mais j’ai découvert (et sabré) avec plaisir une cuvée mousseuse de seyval, élaboré selon la méthode champenoise. Celle-ci est disponible uniquement au domaine, ce qui vous donnera une bonne raison de découvrir les spectaculaires nouvelles installations: une grande salle vitrée qui surplombe les vignes où on aimerait passer la journée.

À défaut de se rendresur place, osez acheter une bouteille de l’Orpailleur blanc pour votre prochain apéro et ainsi, passer par-dessus le complexe qu’on peut avoir face aux vins Québécois.

carone

À Lanoraie, environ une heure au nord de Montréal, on ne s’attend pas à croiser un vignoble sur sa route, encore moins un vignoble avec l’ambition d’Anthony Carone.

Ce fils d’immigrant italien est persuadé que l’avenir du vin au Québec passe par les vins produits à partir de Vitis Vinifera et qu’on y peut produire des vins rouges de qualité. Ainsi, ses cuvées sont entre autres à base de cabernet severnyi (un cépage d’origine russe), sangiovese (racines italiennes obligent!) et pinot noir. Il mène aussi une expérience avec du nebbiolo…!

Homme d’innovation et de conviction, il s’est fait construire des cuves sur mesure afin de mieux contrôler les macérations car celles disponibles ne répondaient à ses besoins. Un nouveau tracteur vient aussi d’augmenter l’arsenal du domaine.

Dans le verre, je ne suis pas convaincu que le pari des vins rouges au Québec soit la route à suivre, comme je l’ai mentionné l’année dernière. Afin d’arriver à un résultat satisfaisant, on sent un peu trop la patte du vigneron (par l’usage du bois neuf) ou les raisins ne sont pas arrivés à une bonne maturité phénolique, laissant un goût un peu vert en fin de bouche.

Ceci étant dit, la cuvée Double Barrel 2009 commence à digérer l’imposant régime de barrique qu’elle a subi et se boit mieux que l’année dernière et Bin 33 s’accomodera très bien d’un plat de pâtes à base de tomates. Aussi, j’ai hâte de voir ce que 2012 a amené aux raisins en termes de maturité et comment ça se traduira dans le verre!

La semaine de notre visite, le vignoble a été frappé très durement par le gel et la récolte 2013 est compromise. Les événements étaient trop récents pour savoir la suite des choses, mais on souhaite la meilleure des chances à Anthony pour la suite.

saragnat

Lorsqu’on parle d’innovation, le nom de Christian Barthomeuf devrait tout de suite faire surface. Pour résumer simplement, le cidre de glace, ce produit devenu en quelque sorte la signature du terroir québécois, c’était son idée. Il a travaillé au lancement de La Face Cachée de la Pomme et du Domaine Pinnacle, deux joueurs majeurs qui volent maintenant de leurs propres ailes.

On retrouve maintenant M. Barthomeuf chez lui, en pleine nature, au Clos Saragnat où il continue de faire du cidre de glace en plus de travailler sur d’autres curiosités, commercialisées ou pas… L’Avalanche et l’Originel (le premier disponible à la SAQ, le second au domaine) ont retenu l’attention des goûteurs et le vin de paille a permis aux gens de découvrir un produit d’exception.

Autant que ses vins, M. Barthomeuf a fait tourner bien des têtes, en jasant permaculture, écosystèmes et absence de parasite dans ses champs, alors qu’ils sont bien présents dans le champ de son voisin…! Ses vues bien arrêtées sur comment se comporter afin d’assurer un produit de qualité et la pérennité de l’écosystème entier devraie t être entendues par le plus grand nombre possible.

Isaac Tremblay - Le Trou du Diable

Pour la première fois cette année, Taste Camp a fait une place de choix à nos microbrasseurs avec une soirée complète de dégustation et un souper accords bières-mets élaboré de main de maître par Pas d’cochon dans mon salon. De tous les brasseurs présents (et pas les moindres: À l’abri de la Tempête, Brasserie Dunham, Dieu du Ciel, Glutenberg, Brasseurs de Montréal, entre autres), mon coup de coeur va à Isaac Tremblay, du Trou du diable, à Shawinigan.

Une bonne partie de ma soirée a été passée investie à sa table à jaser bière, vin, accords, Mauricie et de tout et de rien.

L’ensemble des bières qui nous ont été présentées étaient originales, distinctives et, surtout, savoureuses! Il faut goûter à la Saison du Tracteur et à sa version vieillie en fûts de vin botrytisé californien, la Dulcis Succubus. Ce traitement ajoute une couche de complexité qui tranforme une très bonne bière blonde en une bière de gastronomie. On doit aussi goûter à l’influence des brettamonyces dans la Bretteuse. Évitées dans le monde du vin car elles amènent des (désagréables!) notes d’écurie et de cheval qui a eu chaud ces bactéries apportent à la bière un côté viandeux et animal beaucoup plus subtil que dans le vin. Encore une fois, il s’agit d’une bière faite pour la table, à utiliser pour convertir ceux qui peuvent douter du potentiel énorme des bières québécoises.

La majorité du portfolio n’est disponible que sur place, ce qui donne une bonne raison de s’arrêtrer par Shawinigan lors du prochain aller-retour entre Québec et Montréal!

Que doit-on conclure de ces rencontres? On possède au Québec des artisans de grand talent et ils passent trop souvent incognito. On devrait tous faire un effort (pas juste à l’occasion de la St-Jean!!) pour mettre plus de Québécois dans notre verre.

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Julien Marchand

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1 Comment

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