Du Bordeaux plein la tête

Entre jeudi et dimanche dernier, autour du Bassin Louise à Québec, le vin coulait à flots, la foule était dense et la bonne humeur était au rendez-vous. Pas de doute, la première édition de Bordeaux fête le vin à Québec battait son plein.

Le vaste site d’Espace 400e abritait 7 pavillons thématiques où on pouvait rencontrer des producteurs de toutes les régions du vignoble bordelais, des plus connus comme St-Émilion, Pomerol et Fronsac aux plus modestes Bordeaux et Bordeaux Supérieux. C’était bel et bien le point d’intérêt principal de la fin de semaine, bien que plusieurs ont bien apprécié les ateliers de dégustation de l’École du Vin Tanguay et les découvertes gastronomiques vendues à la Plaza Gourmande. Le stand de la SAQ présentait quant à lui des dégustations animées organisées par les Services Signature qui affichaient toutes complet et on y faisait découvrir les produits qui seront mis en vente lors de la prochaine édition du magazine Cellier.

Pour ma part, dans le cadre de #mission00vin que vous découvrirez plus tard, j’ai écumé le pavillon dédié à la Rive Gauche, en ce jeudi venteux. Plusieurs belles rencontres avec des producteurs passionnés qui semblaient impressionnés (et souvent même un peu débordés) par la foule compacte présente devant leurs kiosques.

Des blancs à découvrir

J’engage d’abord la conversation avec le premier vigneron que je croise à ce kiosque en lui demandant d’où il vient. Il me répond tout simplement “Je suis de chez Smith”, en désignant deux bouteilles de Smith-Haut-Laffite, un blanc 2009 et une (malheureusement vide!!) de rouge 2007. Décidément, je ne commence pas au pied de l’échelle…! Afin d’obtenir le contrôle nécessaire, ils fabriquent leur propres barriques et veillent à garder le toast le plus faible possible afin que leur influence sur le vin soit en accent plutôt qu’en avant-plan… Le vin est imposant et complexe, mais reste toujours en équilibre. Un beau moment!

À côté du majestueux Smith, la Tour Léognan, le deuxième vin du Château Carbonnieux, ne démérite pas malgré le fait qu’il se vende une fraction du prix de son voisin. Le pourcentage élevé de sémillion lui donne une richesse et une ampleur qui surprend. Décidément, les blancs de bordeaux sont méconnus et ceux que j’ai goûté dans Pessac-Léognan me donnent définitivement le goût d’en découvrir plus.

Bordeaux, c’est d’abord du rouge!

Il ne faut pas oublier que la région produit 8 fois plus de vin rouge que de blanc et ce qu’on a pu goûter pendant la fin de semaine était en ligne avec ce ratio. Allons-y en vrac avec deux coups de coeur qui ont retenu mon attention.

D’abord, le Château des Gravières, qui nous fut présenté avec enthousiasme et passion par M. Thierry Labuzan. Cet assemblage de 80% de merlot et de 20% de cabernet sauvignon est atypique dans les Graves, où on retrouve habituellement une majorité de cabernet. Un enthousiasme qui paraît dans le verre, le tout pour près de 20$ à la SAQ, difficile de résister.

On a aussi pu trouver quelques vieux millésimes, comme le superbe Château la Cabanne 2001, un joli Pomerol que vous pouvez trouver dans plusieurs SAQ de la province pour un prix somme toute raisonnable compte tenu du millésime. Le vin est tout à fait à maturité, avec une belle ampleur, des notes tertiaires (sous-bois, feuilles mortes, champignons) à souhait, tout en gardant une belle petite trace de fruit. Un beau vin pour se gâter avec les braisés d’automne qui s’en viennent.

Rien n’est parfait!

Évidemment, rien n’est parfait, surtout lors de la première édition d’un tel événement.

J’ai de loin préféré le début de ma soirée de jeudi ainsi que le début du dimanche, puisque la foule était moins dense. Les vignerons étaient alors beaucoup plus disponibles et on pouvait alors en profiter pour jaser plus longtemps avec eux. Lors des soirées et à l’heure de l’apéro dimanche, la foule était compacte et il n’était pas plaisant d’aller se chercher un verre et carrément impossible de jaser avec les vignerons. Ce fut un beau succès de foule, à n’en pas douter. Il faut croire que je préfère les événements plus intimes…

Il était aussi bien difficile de différencier les vins qui sont (ou seront) disponibles à la SAQ de ceux qu’on ne peut acheter au Québec. Dans plusieurs cas, même les exposants ne le savaient pas… Il serait bon de prévoir un registre des vins qui peuvent être goûtés pendant la fin de semaine et d’identifier clairement ceux qu’on retrouve au Québec. Le consommateur qui a eu un coup de coeur pendant la fin de semaine saura alors s’il peut en mettre rapidement en cave!

Finalement, lorsque la foule n’était pas trop dense, plusieurs offrait la possibilité de déguster plusieurs vins en petites portions pour le prix d’un seul coupon. Car une seule portion de 50 ml par kiosque, sans possibilité d’obtenir d’autres coupons, ce n’est définitivement pas assez pour découvrir plusieurs produits. Plusieurs petites portions de 25 ml auraient probablement été plus appropriées pour la découverte

Ceci étant dit, tout le monde que j’ai rencontré a passé une superbe fin de semaine et a hâte de savoir s’il y aura une prochaine édition. De mon côté, je ne ferai ni une ni deux et je serai en ligne pour déguster du Bordeaux en bonne compagnie, malgré que ça ne soit pas ma région préférée… On se fait un Piemont fête le vin ou Bourgogne fête le vin bientôt…?

Note: Les photos qui illustrent cet article sont une gracieuseté de Caroline Décoste, de Je suis snob. Allez la visiter et dites-lui merci!

Québec fête Bordeaux

Depuis maintenant 50 ans, la ville de Québec est jumelée à Bordeaux afin de coopérer de manière plus étroite. Alors que les retombées de ce type de jumelage sont souvent plus administratifs, la ville de Québec profite du 50e anniversaire de ce lien pour organiser une fête bien concrète: Bordeaux fête le vin à Québec, du 6 au 9 septembre 2012.

Château Margaux (Source: Thomas Hawk , Flickr)
Château Margaux (Source: Thomas Hawk , Flickr)
Cette fête de 4 jours permettra aux Québécois de fêter avec un verre de vin à la main et de faire le plein de découvertes vinicoles. Le site d’Espace 400e sera aménagé de 8 zones plus ou moins géographiques regroupant les divers producteurs présents. Quelques noms plus connus sont présents comme le Château Rabaud-Promis, Château Pape Clément, Château Smith Haut Lafitte et le Château Cantenac. Par contre, la plupart des producteurs présents sont moins connus. C’est le temps de faire des découvertes!

Le passeport, disponible au coût de 30$, donne aussi accès à des ateliers en collaboration avec l’École du vin de Bordeaux sur les productions vinicoles de la région ou même l’accord mets et vins.

Toutefois, ce n’est pas la seule activité qui veut célébrer Bordeaux à Québec au cours de la semaine prochaine. Le magazine Cellier (attention, lien avec un gros contenu flash au lieu d’un simple PDF…) de la SAQ consacre la majorité de son plus récent numéro au millésime 2009, dont les vins commencent à arriver en succursale. Ce troisième millésime du siècle, après 2000 et 2005, fait courir les foules, les critiques et les riches chinois, gonflant le prix d’autant.

On y présente aussi un sympathique match comparatif sous cette même thématique, en servant quelques vagues de Bordeaux à des professionnels. Le résultat et la vidéo “en coulisses” donne un bon aperçu de l’ambiance qui peut régner dans ce genre de dégustations.

Finalement, quelques succursales de la région qui possèdent des stations de dégustation font une place de choix aux vins de Bordeaux. À la SAQ Signature, on peut déguster Roc de Cambes et Haut-Marbuzet 2008. Si vous voulez vous gâter, c’est toutefois à la SAQ L’Ormière qu’il faut se rendre. Un bar à fin tout en Bordeaux, avec comme star Château Margaux 2006 et Haut-Brion 2006. Ce n’est pas tous les jours qu’on peut tremper ses lèvres dans ces grands crus pour une fraction du prix d’achat de 865$ la bouteille. Puisque les quantités sont limitées, il ne faut pas tarder… Comme quoi, les stations de dégustation, lorsque bien gérées, sont un superbe outil de promotion!

D’ailleurs, vous m’excuserez, je m’y rends à l’instant!

Au pays du qvevri

Quand on évoque la Géorgie, certains vont penser aux montagnes du Caucase culminant à plus de 5000 mètres, d’autres à un pont entre l’Europe et l’Asie ou aux tanks de l’escarmouche avec les Russes en 2008. Plusieurs vont simplement demander à voir une carte. Toutefois, peu vont penser que cette petite république du Caucase pourrait être un endroit propice au tourisme, encore moins pour le tourisme vinicole. C’est pourtant bien le cas, puisque la Géorgie est considérée comme le berceau du vin et cette tradition est encore bien vivante de nos jours.

Vignobles en Kakhétie
Vignobles en Kakhétie

En effet, les premières traces de fabrication de vin ont été retrouvées en Géorgie. Il y a 7000 ans, avant la Grèce, la Turquie et l’Égypte, on y cultivait déjà le raisin dans le but de le transformer en vin. La culture du vin est enchassée dans la culture géorgienne: la patronne de la Géorgie, Sainte Nino, a fabriqué une croix à l’aide de ses cheveux et de bois de vigne. Tout au long de la période russe, les vins géorgiens avaient la cote et étaient les favoris à la fois des tsars et de Staline. Toutefois, en 2006, la Russie a banni l’importation de vins géorgiens (et moldaves) pour des raisons “sanitaires”. Deux ans après, les tanks russes étaient en Ossétie du Sud

Qvevris au monastère d'Ikatlo
Qvevris au monastère d’Ikatlo

Aujourd’hui, on produits en Géorgie deux types de vins, ceux produits avec les “techniques européennes” et faites de la manière traditionnelle. Traditionnellement, le raisin est foulé (idéalement avec les pieds) et le tout est ensuite transféré dans un qvevri, un gros récient de terre cuite étanchéisé avec une fine couche de cire d’abeille. Les levures présentes naturellement sur les raisins vont initier le processus de fermentation et on le laisse aller ensuite, jusque la fermentation s’arrête, ça prendra le temps qu’il faudra… Ensuite, le vigneron peut décider de prolonger le contact avec les peaux pour une certaine période de temps, dans un autre qvevri fermé hermétiquement. Le qvervi est ensuite ouverte et le vin est prêt! Cette technique, perfectionnée par les moines géorgiens au fil du temps, est toujours bien vivante aujourd’hui, à la fois dans les monastères que chez les paysans de la Kakhétie.

On s’en doutera, le résultat est bien différent de ce qu’on est habitué de boire. De manière générale, les blancs prennent une couleur dorée, voire même ambrée et développent des notes poivrées qu’on retrouve en plus ou moins grande importance selon le cépage utilisé, de même qu’un petit côté oxydatif. Il est bien difficile de faire un parallèle avec ce qu’on peut trouver ici. Dans le cas du rkatsiteli, on pourrait l’associer avec un viognier avec pas mal plus d’acidité… Fans du Jura, vous êtes déjà habitués aux vins hors-normes, ceci pourrait certainement vous plaire!

Du saperavi artisanal, dans une vieille bouteille de vodka...
Du saperavi artisanal, dans une vieille bouteille de vodka…

En rouge, le cépage le plus répandu est le saperavi. Ce cépage teinturier produit des vins presque mauves, au nez et à la charpente particulièrement imposants. Après son traitement en qvevri, les tannins se sont légèrement rangés et un nez de fruits noires et d’épices vient voler la vedette. Il est possible de se donner une idée de ce que peut donner ce cépage puisqu’on retrouve un saperavi (fait avec les techniques européennes) à la SAQ. Avec ses tannins et son acidité naturellement élevée, le saperavi produit des vins qui peuvent généralement vieillir très bien dans le temps. Un 2007 goûté chez Pheasant’s Tears était encore tout jeune et fringant, malgré le fait qu’il s’agissit du premier millésime produit par le domaine.

La Géorgie ne se limite pas qu’à ces deux seuls cépages, puisqu’on retrouve près de 500 cépages autochtones dans le paysage vinicole. Plusieurs sont vinifiés en quantités minuscules, mais font toujours partie des plantations locales. Puisque dans la tradition géorgienne, les cépages sont rarement assemblés, on peut facilement sortir de notre zone de confort avec du Mtsvane, un blanc rafraîchissant avec une touche de verdeur, un Chinuri léger et floral ou un Tavkveri, un rouge assez léger.

Si on veut goûter au meilleur de la Géorgie au Québec, les vins de Pheasant’s Tears seront bientôt disponibles en importation privée via La QV et se vendront entre 25 et 30 dollars. Je sais que je vais en commander quelques bouteilles, et ça ne sera pas que par nostalgie de mon voyage dans ce pays à découvrir.

Quelques vins pour l’apéro

Avec l’arrivée des vacances, le beau temps qui se met de la partie et les soirées qui s’étirent à l’extérieur, on est souvent à la recherche de rafraîchissements pour la fin de l’après-midi, à partager entre amis. Comme on est tous parfois à court d’idées, ou pour faire des découvertes, voici quelques idées en vrac!

Des bulles!

En plus d’être délicieux et rafraîchissant, il y a un élément festif qui rend instantanément les humeurs meilleures. Et en plus, contrairement à la croyance de certains, pas nécessairement besoin de prendre une deuxième hypothèque pour ouvrir des bulles de temps à autre!

Par exemple, le superbe pétillant naturel You Are So Bubbly est disponible chez Insolite Importation pour un peu plus de 20$. Il vient en caisses de 6, parfait pour finir l’été!

Sinon, on peut aller chercher dans le nord de l’Italie, où on produit le Prosecco. Souvent, ce sont des bulles pas trop chères et pas trop compliquées. Sur le patio, l’accord avec des chips nature sera surprenant et particulièrement réussi. Une fin d’après-midi au soleil, avec le Prosecco Crede Bisol et des bons amis est un synonyme de bonheur.

Du blanc!

À l’apéro, j’aime servir un vin blanc qui a une bonne acidité mais qui ne donne pas avec excès dans les fruits exotiques, ce qui a tendance à me lasser après une coupe. Par exemple, le Menetou-Salon Morogues du Domaine Pellé ou le Soave Classico de Pieropan (offert aussi en demie-bouteille pour les apéros plus intimes…) font toujours des bons candidats.

Pour les soirs où on cherche à célébrer une bonne nouvelle et qu’on veut augmenter le niveau, on peut se tourner vers le Chablis La Vigne de la Reine du Château de Maligny. Récemment encensé par Jacques Benoît dans La Presse et par Marc-André Gagnon sur Vin Québec, la SAQ écoule présentement les dernières bouteilles du plus récent arrivage. Je n’ai pas goûté personnellement au millésime 2010, mais tout pointe vers une aussi belle réussite que le 2009 dégusté chez un ami l’année dernière!

Du rouge!

Si vous penchez plus vers le rouge, j’ai tendance à privilégier un Beaujolais de bon niveau, comme le Raisins Gaulois, le vin issu des jeunes vignes du mythique domaine Lapierre. Pour 17,65$, vous vous désolerez lorsque la bouteille sera vide, ce qui risque d’arriver pas mal plus rapidement que prévu. Pour un exemple un peu plus structuré, mais qui conserve une fraîcheur exemplaire, le Fleurie Poncié du Domaine Vissoux vient de revenir à la SAQ. Ces deux bouteilles feront un malheur avec un simple plateau de charcuteries, encore une fois, partagé avec des bons amis.

Un Fleurie qui disparaît trop rapidement

Parfois, lorsqu’on ouvre une bouteille pour accompagner le souper, je me dis que j’ai envie de voir comment il va évoluer sur quelques heures, jusqu’au lendemain. Sur deux jours, on a souvent une meilleure idée de ce que le vin a dans le corps: le nez prend de l’ampleur et se complexifie, la bouche, lorsque bien équilibrée reste droite et aucun élément ne prend le dessus sur les autres.

Parfois, malgré toutes nos bonnes intentions, on cligne des yeux et la bouteille est vide. C’est tout à fait ce qui s’est passé cette semaine après avoir ouvert une bouteille de Fleurie Les Garants 2009 de Pierre-Marie Chermette. Pour documenter, il faut même aller extirper la bouteille vide du bac de recyclage…

Les crus de Fleurie sont traditionnellement reconnus pour leur délicatesse et leur féminité. Moulin-à-Vent, tout juste à côté, offre typiquement des vins plus structurés et un peu plus imposants. Oui, il peut y avoir de la structure dans le Beaujolais. La parcelle des Garants, située tout près de cette dernière, offre le meilleur des deux appellations.

Du fruit rouge à revendre, comme dans plusieurs Beaujolais, mais ça ne s’arrête pas là. Des fleurs et une petite pointe d’épice viennent complexifier le nez. En bouche, l’ampleur de 2009, millésime historique dans la région, se fait sentir. Malgré toute la générosité du fruit, il y a toujours cette acidité rafraîchissante qui garde le tout en équilibre. Cette grande sapidité a fait disparaître la bouteille en moins de deux, nous laissant nous demander pourquoi j’en avais pas acheté plusieurs exemplaires

Certes, pour plusieurs, payer 26$ pour un Beaujolais frôle l’hérésie. Effectivement, ce n’est pas donné, mais à ce prix, on est parmi ce qui se produit de mieux dans cette région du monde. À Bordeaux ou ailleurs, pour 26$, on est proche du top des appellations…? Poser la question, c’est y répondre…

Avis aux intéressés: au moment d’écrire ces lignes, il n’en restait que 2 dans toute la province… Toutefois, le Fleurie Poncié 2010 est un peu plus disponible. Quant au Brouilly 2010 qui lui est abondant, il m’a un peu déçu, un peu trop bonbon à mon goût. Préférez-lui le simple Beaujolais Les Griottes et prenez le 6$ économisé pour acheter une belle charcuterie!