Un terroir en pleine adolescence

Du 13 au 15 mai dernier, j’ai participé à TasteCamp, une réunion de blogueurs vinicoles. Pour sa troisième édition, le goupe a visité la région du Niagara, des deux côtés de la frontière, après avoir visité Long Island et les Finger Lakes lors des deux éditions précédentes. Je dois admettre, qu’avant mon arrivée au Niagara, je ne connais que très peu les vins qui y sont produits, même s’il s’agit d’une des régions vinicoles les plus proches de chez moi.

Dès les premiers moments de la fin de semaine, le ton était donné. Accueillis au Château des Charmes par Paul Bosc Jr. devant une carte des différentes régions et sous-appellations de la région, nous avons pu apprécier les efforts des vignerons de bien connaître les conditions dans lesquelles ils doivent travailler. C’est en partie grâce à l’implication de l’université Brock, située à Ste-Catharines, qui a largement étudié la géologie et le climat de la région du Niagara.

Paul Bosc Jr. expliquant les terroirs du Niagara
Paul Bosc Jr. expliquant les terroirs du Niagara (Cliquez pour un agrandissement de la carte)

Au Château des Charmes, nous avons eu rendez-vous avec trois échantillons tirés de différentes barriques d’Equuleus 2010, le vin-phare du domaine. Avec différents types de barriques (barriques neuves plus ou moins toastées, de même qu’une barrique vieille de trois ans), on a pu apprécier les différences que ce traitement apporte, malgré le jeune âge évident de ce qui était servi. J’ai préféré l’échantillon avec le bois neuf moins toasté, mais il a été difficile d’évaluer un vin à ce stade de son vieillissement. Ensuite, nous avons pu goûter au produit fini, le Equuleus 2007, la preuve que des assemblages de type bordelais de bonne qualité sont possibles dans le Niagara, du moins, lors des années les plus chaudes.

Toutefois, lors de la dégustation avec plusieurs producteurs de Niagara-on-the-Lake, on a toutefois pu constater que tous n’étaient pas rendus au même niveau de maturité. Les meilleurs producteurs ont une bonne offre, mais la qualité est parfois hétérogène. Les meilleures impressions vont à l’ambitieux assemblage bordelais de Stratus, aux pinots de chez Lailey Vineyards ainsi qu’au Cabernet Franc de Ravine Vineyard.

Quand on parle de terroir, une bonne partie consiste en reconnaître le potentiel que le climat offre et ensuite travailler avec cette offre. La région est suffisamment mature pour reconnaître que le climat est plus chaud à Niagara-on-the-Lake, suffisamment pour permettre de cultiver des variétés bordelaises avec un bon degré de maturité. Sur le Bench, cette formation rocheuse en surplomb du lac Ontario à l’ouest de Ste-Catharines, le climat est un peu plus frais et on retrouve plus de chardonnay, de pinot et de riesling. Les quelques producteurs qui ont décidé de produire des variétés bordelaises sur le Bench ne m’ont pas convaincu…

Barriques chez Tawse
Barriques chez Tawse
De manière générale, j’ai préféré les vins issus du Bench. Les chardonnays de Tawse sont des produits de haut vol, en finesse et en équilibre, avec une utilisation des barriques juste à point, sans excès et sans masquer le terroir. Au Québec, on vient de recevoir une cinquantaine de bouteilles du Chardonnay Robyn’s Block 2008 qui vaut bien les 49$ demandés. Notre cher monopole offre aussi différentes cuvées Echos pour un peu plus d’une vingtaine de dollars de ce vignoble biodynamique, sur lequel je reviendrai plus en détails plus tard.

Il ne faut pas oublier non plus Le Clos Jordanne, qui produit des cuvées de haut niveau à chaque année, Vineland Estates qui nous a servi un riseling 1989 (qui se vendait 8$ à l’époque!) toujours parfaitement en vie et qui possède un des plus vieux vignobles de la région et 13th Street, un domaine d’envergure plus modeste qui produit un superbe mousseux rosé, parfait pour célébrer l’été qui approche.

Au final, on peut déterminer que la région est pleine de potentiel. Lors des meilleures années, les meileurs producteurs ont une offre de très haut niveau et les autres arrivent à faire des bien bons vins. Lors des moins bonnes années, on reconnaît tout de suite la différence entre les producteurs qui connaissent bien leur terroir et qui savent quoi en tirer des autres. La région commence à trouver un peu de maturité, tant au niveau des vignes que du savoir-faire. Après tout, le terroir, c’est bel et bien la combinaison de ces deux facteurs! Les vins dégustés pendant cette fin de semaine m’ont convaincu de garder un oeil plus attentif sur le Niagara.

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Julien Marchand

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